Rien à l'horizon ?
J’ai traversé le passage piéton et je me suis dirigé droit sur la porte. La nuit était tombée. La maison baignée d’un halo de lumière m’impressionnait. La sonnette retentit. Déjà en face de moi, un homme d’une quarantaine d’année me fit signe d’entrer et de le suivre. Il s’engagea dans un long couloir sur la gauche. Au bout du couloir, il m’indiqua la deuxième porte sur la droite. J’hésitai, l’homme secoua la tête pour me convaincre d’entrer. Derrière la porte se tenait une petite dame toute menue qui m’attrapa presque le bras pour que je la suive. Nous traversâmes une pièce immense, vide de meubles, seul un mur était recouvert d’un très grand miroir. La dame me poussa au travers d’une porte entrouverte à l’autre bout de la pièce. Là, il y avait plusieurs salons. Dans un miroir semblable à celui que je venais de voir, j’aperçu une jeune femme en robe légère assise sur un sofa.
- Je vous attendais
- Bonjour Madame. Vous êtes Madame ROOSEL ?
Pas de réponse.
- Monsieur ROOSEL est actuellement en déplacement. Les conditions pour ce travail sont : 35 000 € par mois pendant douze mois. Si vous nous rendez votre travail avant la période des douze mois et s’il nous donne satisfaction, nous vous verserons le solde des mois restants. Si vous avez besoin de plus de temps, au-delà des douze mois ce sera à l’appréciation de Monsieur ROOSEL. Bien sûr cette rémunération s’entend tous frais compris.
Je l’écoutai et ne découvris rien que je ne connaissais déjà.
Comme elle regardait l’appareil photo que j’avais autour du cou, elle me dit :
- Bien sûr, tout ceci reste entre nous, pas de photos ici. Vous utiliserez vos talents de photographe pour votre rapport circonstancié sur Mr VANDERBLOCK qui fait l’objet du contrat.
- Et si je ne trouvais rien sur Monsieur VANDERBLOCK qui puisse le compromettre ?
M’entendis-je lui dire.
La jeune femme poursuivait :
- Nous voulons tout savoir, tout connaître au sujet de sa sexualité, de ses manies, de ses petites faiblesses, vous trouverez bien quelque chose.
Je savais qu’à ce moment précis, cette jeune femme dont je ne savais rien, appréciait mon silence.
- Jusqu’à présent, j’ai été en contact avec monsieur ROOSEL, dorénavant à qui devrais-je rendre des comptes ?
- Voici un téléphone portable sur lequel vous pourrez être joint à tout moment. Si vous avez besoin de nous contacter vous le ferez par e-mail comme précédemment et en cas d’extrême urgence vous nous appellerez au numéro inscrit dans le répertoire.
La jeune femme se leva. Elle était grande et d’un physique agréable. Elle pris sur la table, dans une sacoche en cuir, une pochette qu’elle me tendit en disant :
- Voici votre contrat.
Je le parcourai rapidement et le signai.
Tout le reste se passa très vite, la dame menue puis l’homme qui était venu me chercher sont revenus et m’ont raccompagnés jusqu’à la porte que j’entendis fermer à double tour.
La nuit était encore plus noire. Le ciel, bleu d’encre était pesant. Je m’engouffrai dans ma voiture et repartis sans me retourner.
Je repensais à cet entretien dans l’avion qui m’emmenait vers New York. Tout avait été très vite depuis que j’avais été contacté par Monsieur ROOSEL. Tout cela me semblait incroyable. J’avais traversé le passage piéton et sonné à la porte de cette maison en pleine nuit. Je repensais à cette femme légèrement vêtue. Qui était elle ? Comment connaissait-elle Monsieur ROOSEL ? Moi qui m’attendais à le rencontrer, j’en étais pour mes frais. Qui était Monsieur ROOSEL ? Depuis quand la jeune femme, travaillait-elle pour lui ? Quelles étaient ces rapports avec lui ? Dans ma tête, je la revoyais, le corps dodelinant sur le sofa rembourré, donnant l’impression que sa chair allait sortir de sa fragile gangue de soie qui l’emprisonnait.
J’avoue qu’elle m’était apparue délicieusement érotique. Alors, me suis-je dis, pourquoi n’ai-je pas tenté de poser une main sur sa cuisse offerte. Mais, tout comme je n’étais pas parvenu à poser les questions qui me traversaient l’esprit lors de l’entretien, je ne suis pas arrivé à déceler dans ses yeux verts d’éclairs malicieux d’encouragements.
Je n’ai pas hésité à prendre le premier vol pour New York, dès que j’ai su que Monsieur VANDERBLOCK allait y passer dix jours. Je n’avais pas de temps à perdre. J’avais un boulot, une mission, de plus bien payé. C’était inespéré, il y a encore que quelques jours. Aussi je fonçai tête baissée bien décidé à mener rondement les choses.
PDG des Assurances VANDERBLOCK, Jean-louis était né en 1957, le 3 janvier. Il était marié et avait trois enfants. Il mesurait un mètre soixante dix sept et personne ne lui connaissait de signes particuliers. Il avait retenu dix nuits à l’hôtel Hudson, près de colombus circle et de central park. Est qu’il fêtait un anniversaire de mariage, un événement quelconque, car ce n’avait pas l’air d’être un déplacement professionnel ?
Je ne devrais à l’avenir ne rien négliger et examiner avec attention toutes les hypothèses qui se présenteraient à moi.
J’avais réussi à convaincre la femme de ménage de m’ouvrir la porte de la chambre 2018 de Monsieur VANDERBLOCK Je mettais fait passer pour lui. J’auscultai sa trousse de toilette à la recherche du moindre indice. J’étais mal à l’aise. Ai-je bien fait d’accepter ce travail ? Fouiller dans la vie des gens, « beurk » pensai-je. Ce n’était pas ma nature. Ce travail tombait à pic et je n’avais pas à faire le difficile, soit, mais ne serais-je pas confronter à des situations que je ne pourrais assumer ? J’étais aux aguets. Il fallait faire vite. Monsieur VANDERBLOCK pouvait revenir à tout moment. J’écoutais le moindre bruit provenant du couloir. Le lit était défait. Il n’y avait rien dans la trousse de toilette, ni dans la salle de bain. La valise était fermée. Je n’étais qu’un petit amateur. J’étais incapable de l’ouvrir. Pourquoi Monsieur ROOSEL m’avait recruté ? Je n’en avais pas la moindre idée. Décidemment je ne trouvai rien d’intéressant. Il était peut être encore temps de les rattraper. Si je devais trouver quelque chose qui puisse être compromettant, cela pourrait se produire à n’importe quelle moment. Peut être qu’en ce moment ils étaient montés dans un taxi pour « Je ne sais où ? ». Je prenais conscience que ce travail ne serait pas une partie de plaisir. Je me sentais déjà trop seul pour le mener à bien. Tout en descendant les cinq étages, dans l’ascenseur, je me disais que si mon téléphone portable se mettait à sonner et qu’à l’autre bout du fil Monsieur ROOSEL me demandait : « Alors que font ils ? Vous n’êtes pas sensé les suivre ? Que faîtes vous ? ».
Je serais bien embêté.